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Et quel charme touchant ne promettent-ils pas A des yeux exercés, à des sens délicats! Insensible habitant des champêtres demeures, Sans distinguer les lieux, les saisons et les heures, Le vulgaire au hasard jouit de leur beauté: Le sage veut choisir. Tantôt la nouveauté Embellit les objets; tantôt leur déclin même Aux objets fugitifs prête un charme qu'on aime : Le cœur vole au plaisir que l'instant a produit, Et cherche à retenir le plaisir qui s'enfuit. Ainsi l'ame jouit, soit qu'une fraîche aurore Donne la vie aux fleurs qui s'empressent d'éclore, Soit que l'astre du monde, en achevant son tour, Jette languissamment les restes d'un beau jour. Tel, quand des fiers combats Homère se repose, Il aime à colorer l'Aurore aux doigts de rose: Tel le brillant Lorrain, de son pinceau touchant, Souvent dore un beau ciel des rayons du couchant. Étudiez aussi les momens de l'année :

L'année a son aurore, ainsi que la journée.

Ah! malheureux qui perd un spectacle si beau!
Le jeune papillon, échappé du tombeau,

Qui sur les fruits naissans, qui sur les fleurs nouvelles,
S'envole frais, brillant, épanoui comme elles,

Jouit moins au sortir de sa triste prison,
Que le sage au retour de la belle saison.
Adieu des paravents l'ennuyeuse clôture,
Adieu livres poudreux, adieu froide lecture!

Du grand livre des champs les trésors sont ouverts: Partons, que les beaux lieux me rendent les beaux vers!

Si des beaux jours naissans on chérit les prémices, Les beaux jours expirans ont aussi leurs délices; Dans l'automne, ces bois, ces soleils pâlissans, Intéressent notre ame, en attristant nos sens: Le printemps nous inspire une aimable folie; L'automne, les douceurs de la mélancolie. On revoit les beaux jours avec ce vif transport Qu'inspire un tendre ami dont on pleuroit la mort; Leur départ, quoique triste, à jouir nous invite : Ce sont les doux adieux d'un ami qui nous quitte; Chaque instant qu'il accorde on aime à le saisir, Et le regret lui-même augmente le plaisir.

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Majestueux été, pardonne à mon silence! J'admire ton éclat, mais crains ta violence, Et je n'aime à te voir qu'en de plus doux instans, Avec l'air de l'automne, ou les traits, du printemps. Que dis-je ? ah! si tes jours fatiguent la nature, Que tes nuits ont de charme, et quelle fraîcheur pure

Vient remplacer des cieux le brûlant appareil !
Combien l'œil, fatigué des pompes du soleil,
Aime à voir de la nuit la modeste courrière
Revêtir mollement de sa pâle lumière,

Et le sein des vallons, et le front des coteaux;
Se glisser dans les bois, et trembler dans les eaux!
L'hiver, je l'avoûrai, je suis l'ami des villes:
Là des charmes ravis aux campagnes fertiles,
Grâce au pinceau flatteur, aux sons harmonieux,
L'image frappe encor mon oreille et mes yeux,
Et j'aime à comparer, dans ce portrait fidèle,
Le peintre à la nature et l'image au modèle.

Si pourtant dans les champs l'hiver retient mes pas,
L'hiver a ses beautés. Que j'aime et des frimats
L'éclatante blancheur, et la glace brillante,
En lustres azurés à ces roches pendante!

Et quel plaisir encor, lorsqu'échappé dans l'air
Un rayon du printemps vient embellir l'hiver,
Et, tel qu'un doux souris qui naît parmi des larmes,
A la campagne en deuil rend un moment ses charmes!
Qu'on goûte avec transport cette faveur des cieux!
Quel beau jour peut valoir ce rayon précieux,
Qui, du moins un moment, console la nature!
Et si mon œil rencontre un reste de verdure

Dans les champs dépouillés, combien j'aime à le voir!
Aux plus doux souvenirs il mêle un doux espoir,

Et je jouis, malgré la froidure cruelle,

Des beaux jours qu'il promet, des beaux jours qu'il rappelle.

Le ciel devient-il sombre? Eh bien! dans ce salon,
Près d'un chêne brûlant j'insulte à l'aquilon.
Dans cette chaude enceinte, avec goût éclairée,
Mille doux passe-temps abrègent la soirée.
J'entends ce jeu bruyant où, le cornet en main,
L'adroit joueur calcule un hasard incertain.
Chacun sur le damier fixe, d'un œil avide,
Les cases, les couleurs, et le plein et le vide:

Les disques noirs et blancs volent du blanc au noir;
Leur pile croît, décroît. Par la crainte et l'espoir
Battu, chassé, repris, de sa prison sonore

Le dez avec fracas part, rentre, part encore;
Il court, roule, s'abat: le nombre a prononcé.
Plus loin, dans ses calculs gravement enfoncé,
Un couple sérieux qu'avec fureur possède
L'amour du jeu rêveur qu'inventa Palamède,
Sur des carrés égaux, différens de couleur,
Combattant sans danger, mais non pas sans chaleur,
Par cent détours savans conduit à la victoire
Ses bataillons d'ébène et ses soldats d'ivoire.

PLOR

Long-temps des camps rivaux le succès est égal.
Enfin l'heureux vainqueur donne l'échec fatal,

Se lève, et du vaincu proclame la défaite.
L'autre reste atterré dans sa douleur muette,
Et, du terrible mat à regret convaincu

Regarde encor long-temps le coup qui l'a vaincu.
Ailleurs c'est le piquet des graves douairières,
Le lotto du grand-oncle, et le wisk des grand-pères.
Là, sur un tapis vert, un essaim étourdi

Pousse contre l'ivoire un ivoire arrondi ;
La blouse le reçoit. Mais l'heure de la table
Désarme les joueurs; un flacon délectable
Verse avec son nectar les aimables propos,

Et, comme son bouchon, fait partir les bons mots.
On se lève, on reprend sa lecture ordinaire,
On relit tout Racine, on choisit dans Voltaire.
Tantôt un bon roman charme le coin du feu :
Hélas! et quelquefois un bel esprit du lieu
Tire un traître papier; il lit, l'ennui circule.
L'un admire en bâillant l'assommant opuscule,

Et d'un sommeil bien franc l'autre dormant tout haut
Aux battemens de mains se réveille en sursaut.

On rit; on se remet de la triste lecture;

On tourne un madrigal, on conte une aventure.

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