FABLES DE GAY. INTRODUCTION. Le Berger et le Philosophe. Jamais ne suspendit ses innocents travaux. Il avait feuilleté les livres avec fruit, Mon ami, dit-il au rustique, Où donc as-tu puisé ton célèbre savoir? Dans les écrits de Rome ou de la Grèce antique De l'homme appris-tu le devoir? Socrate éclaira-t-il ton ame? Le divin Platon, Tullius, En toi des sublimes vertus Ont-ils alimenté la flamme? Ou, tel qu'Ulysse, égaré sur les mers, Au milieu des écueils, des daugers, des naufrages, As-tu de cent peuples divers Étudié les lois, les mœurs et les usages? Du savoir, répond le Berger, Je n'abordai jamais l'auguste sanctuaire; Echappant aux plus subtils yeux, L'homme en trompe aisément l'adroite vigilance › Je m'ignore moi-même ; hélas ! pourrais-je mieux Sonder du cœur d'autrui le labyrinthe immense? Si de quelques vertus en moi Vous découvrez la faible trace, A la nature seule il faut en rendre grace: Près de l'industrieuse abeille, Dans un lâche repos languirais-je endormi? En voyant l'active fourmi, Le soin de l'avenir dans mon ame s'éveille.. M'enseigne la reconnaissance; Il tressaille, il bondit à ma seule présence, Auprès de la colombe on prendrait des leçons ; Nous sauve par l'aspect propice Irai-je d'un rêveur afficher l'importance, Eh! qui, dans sa rage inhumaine, Penserait sans frayeur à la trop juste haine De la vipère insidieuse, |